Surréalisme

Texte de Gilberte Martin-Méry, conservateur des Musée et Galerie des Beaux-Arts, pour le catalogue de l'exposition :

"Une manifestation de cette envergure se pense, se conçoit des mois, ou même des années, à l'avance. Il faut d'abord qu'elle puisse s'inscrire dans le calendrier international des expositions. Il arrive que bien souvent Paris, New York, Tokyo ou Munich aient des projets semblables, soit qu'il s'agisse d'un anniversaire à célébrer, soit tout simplement que le goût du jour conduise au même artiste ou à la même période de l'histoire de l'Art.
Il en a été ainsi pour la présentation des Surréalistes à Bordeaux. L'Orangerie des Tuileries vient d'inaugurer un hommage à « Max Ernst » pour ses quatre-vingts ans. Tokyo organise une rétrospective « Magritte », et les prêteurs ont eu à faire un choix entre le Japon et Bordeaux. En ce moment, des toiles importantes de Picabia circulent entre les Musées des Etats-Unis et du Canada, tandis qu'Ostende se propose d'offrir à ses estivants un ensemble de toiles de Miro. Les Musées de Rotterdam et de Baden-Baden, pour leur part, terminent une importante exposition Dali. Enfin, Munich et Paris prévoient pour 1972 une manifestation consacrée également au mouvement surréaliste.
Nous avons donc eu quelques scrupules à faire appel aux amateurs éclairés, mais, une fois de plus, ils ne nous ont pas refusé leur concours. Un grand esprit de solidarité a joué en faveur de l'efficacité de nos recherches en France et dans le monde : conservateurs de musées, collectionneurs et artistes, directeurs de galeries se sont unis pour faciliter la réalisation de notre projet, ce qui au départ semblait presque impossible.
Dans le premier quart du XXe siècle, le Surréalisme apparaît comme un des mouvements les plus importants, tant dans le domaine littéraire que dans celui des arts plastiques. Vers 1920, des écrivains, des essayistes, des poètes, des peintres et des sculpteurs de tout premier plan et de tous pays, regroupés autour d'André Breton, « pape du Surréalisme », ont la foi qui déplace les montagnes; ils s'imposent et font de Paris la capitale du groupe jusqu'en 1940. L'exode ne les empêche pas de se retrouver aux Etats-Unis, où certains d'entre eux n'ont cessé, par leurs créations, de faire vivre l'esprit initial. Révolte permanente contre toutes les valeurs établies, le Surréalisme se donne pour mission d'explorer l'inconscient et les rêves pour mener à bien une connaissance qui fait l'homme poète. Cet idéal même a aujourd'hui des prolongements dans la jeune peinture, qui s'efforce de le faire renaître, mais cette tentative pourrait être l'objet de nouvelles études. C'est ainsi que, pour cerner objectivement le sujet, et paradoxalement, nous essayons de présenter à un nouveau public les « classiques du Surréalisme ».

La préparation de l'exposition a nécessité une connaissance plus approfondie de ce mouvement, déconcertant de prime abord. A l'égard de ces artistes, un enthousiasme de plus en plus vif s'est communiqué du Service scientifique de la Conservation aux Services techniques du Laboratoire et à ceux du Secrétariat et a permis un travail d'équipe efficace et fructueux.
Patrick Waldberg, historien du Surréalisme, a bien voulu encourager cette initiative en écrivant l'introduction du catalogue, je l'en remercie très chaleureusement, ainsi que M. Roberts-Jones, conservateur en chef des Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique, qui a accepté de traiter un sujet qu'il connaît bien : Magritte et Delvaux. Je remercie aussi tous ceux qui ont contribué à la mise en place de cette vingt et unième manifestation.
Mais comment pourrais-je exprimer ma gratitude à André Masson, qui, avec son talent plein de jeunesse et de passion, a réalisé la lithographie de l'affiche ? Il a trouvé dans sa « Main » les racines mêmes du Surréalisme sans en négliger les nouvelles pousses, portant ainsi le témoignage du passé et de l'avenir."

Vues de l'exposition et du vernissage :