Boeckhort Le Martyre de Saint Laurent
Munster 1605 - Anvers 1668
Lorsque Rubens mourut en mai 1640, la vie artistique de Flandre subissait profondément sa forte influence. La mémoire de Rubens et son influence restèrent vives dans son pays malgré le grand nombre de peintres, moins importants, qui tant à Bruxelles qu'à Anvers, cherchèrent à créer et à développer des tendances artistiques conformes aux temps nouveaux.
Selon la Légende Dorée, saint Laurent est originaire d'Aragon. En 258, il fut ordonné diacre par le pape Sixte II à Rome qui lui confia le trésor de l'Eglise. Refusant de le livrer à l'empereur Decius, ce dernier le condamna à différentes tortures et à mourir sur un brasier.
Le martyr est ici enchaîné sur un gril sous lequel luisent des charbons ardents. Muni d'un long ringard, un soldat le torture avec un fer rouge, tandis que deux aides le maintiennent couché. Trois autres personnages assistent à la scène, un enfant à droite, dont le regard insistant et pénétrant fixe le spectateur et le prend à témoin : à l'arrière-plan, au-dessus de lui, une statue d'Apollon, et à gauche, un angelot portant la couronne et la palme des martyrs.
Dans cette oeuvre, Boeckhorst s'inspire d'une composition de Rubens sur le même sujet conservée à l'Alte Pinakothek de Munich, datée vers 1615 - 1616. Le cadrage de la scène rapproché, la position du saint en diagonale, la représentation du gril, le brasier avec la manne de charbon renversée proviennent de cette oeuvre, ainsi que l'angelot portant les attributs du martyr et l'idée de la statue à l'arrière-plan à droite.
Rubens déjà avait été influencé par un tableau de Titien sur le même sujet, d'où proviennent directement certains motifs de notre oeuvre.
On peut enfin rapprocher ce tableau d'un Martyre de saint Maurice par Boeckhorst à Lille (daté de 1661), tant du point de vue stylistique que de l'organisation générale de la composition. Dans ces deux tableaux, comme dans la plupart de ceux exécutés entre les années 1650 et 1660 environ, Boeckhorst se démarque stylistiquement de Rubens pour se rapprocher de Van Dyck. Ainsi l'élongation des silhouettes, la gamme chromatique, le pathétique des expressions et des attitudes, l'accent porté sur le contenu émotionnel et dramatique sont autant d'éléments qui traduisent l'influence de ce dernier sur sa production.
Tandis que Rubens se mouvait avec facilité dans tous les domaines - ou qu'il se consacrât au portrait, à la décoration, au paysage - ses compagnons, ses élèves et surtout ses imitateurs se spécialisèrent dans un seul genre. C'est ainsi que Boeckhorst s'est surtout consacré à la peinture religieuse et mythologique.