Jean-Marc NATTIER, "Etude pour le portrait de Marie-Josèphe de Saxe"
(Paris, 1685 – Id., 1766)
Etude pour le portrait de Marie-Josèphe de Saxe
Vers 1750
Huile sur toile.
Hauteur 60 cm. Largeur 50 cm.
Historique : Ancienne collection royale. Achat par les musées royaux, 1839. Envoi de l’Etat, 1872.
Charles-François-Paul Le Normant de Tournehem (1684-1751), directeur des Bâtiments du Roi, commanda à Nattier des portraits de la famille royale à partir de 1748. Chaque tableau lui était payé 500 livres. Le portrait de Bordeaux fut commencé en 1750 à Fontainebleau, lors d’un séjour de la cour, mais il ne fut jamais terminé. En revanche, les héritiers de Nattier reçurent l’entier paiement deux ans après la mort du peintre.
Depuis la Révolution, l’identité du modèle avait disparu au profit de celle d’autres princesses - Madame Henriette en 1905, puis Madame Victoire en 1993 – avant de revenir à Marie-Josèphe de Saxe en 1999-2000 (X. Salmon).
Marie-Josèphe Caroline Eléonore Françoise Xavière de Saxe (1731-1767) était la fille d’Auguste III (1696-1763), roi de Pologne et électeur de Saxe, et de Marie-Josèphe d’Autriche (1699-1757), fille aînée de l’empereur Joseph Ier. En 1747, elle épousa le Dauphin Louis (1729-1765) avec qui elle eut huit enfants dont les futurs Louis XVI, Louis XVIII et Charles X.
La jeunesse et la douceur du visage de la Dauphine, traitées dans une gamme peu étendue de couleurs, trahissent ses dix-neuf ans. Seul, le fard rouge des joues rehausse le teint blanc du modèle alors que l’absence de parure et de coiffure complexe souligne la simplicité de l’esquisse.
Fils du portraitiste Marc Nattier, Jean-Marc Nattier commença son apprentissage artistique sous la férule de son parrain Jean-Baptiste Jouvenet (1644-1717). Ainsi placé sous l’influence conjointe de Le Brun (1619-1690) et de Rubens (1577-1640), Nattier commença sa carrière par la peinture d’histoire (Bon Samaritain, 1708, coll. part.) et fut reçu à l’Académie le 29 octobre 1718 avec Persée, assistée par Minerve, pétrifie Phinée et ses compagnon en leur présentant la tête de Méduse (Tours, musée des Beaux-Arts). Cependant, il avait déjà réalisé l’année précédente le portrait du tsar Pierre Ier de Russie (Munich, musée de la Résidence) en s’inspirant d’Hyacinthe Rigaud (1659-1743). Au cours des années 1720, le peintre mêla le portrait à l’allégorie (Le Comte Maurice de Saxe, 1720, Dresde) en s’inspirant du cycle de Rubens au Luxembourg, commandé par Marie de Médicis. Il lui fallut attendre les années 1735-1740 pour atteindre à un style plus personnel. Face à une concurrence importante de nombreux confrères, Nattier se démarqua en privilégiant une gamme chromatique associant bleu, gris perle, vert et rose, et en pratiquant des touches légères et duveteuses qui donnent du volume. Les contemporains lui ont surtout reconnu ce talent d’embellir ses modèles sans trop s’éloigner de la ressemblance.
Devenu le portraitiste officiel de la famille royale en 1748, Nattier connut un succès considérable auprès de la haute aristocratie mais surtout de la clientèle féminine. Il put y faire face grâce à des séries d’études peintes rapidement d’après le modèle - le tableau de Bordeaux et L’Etude du visage de Madame Infante (1749, Copenhague, Statens Museum for Kunst) - et grâce à un répertoire d’attitudes qu’il soumettait au commanditaire.
Les peintres du Cabinet du Roi (Jeaurat de Bertry, Nivelon ou Prévost) n’hésitaient pas à copier les œuvres du maître ou à les adapter à d’autres portraits. C’est le cas du portrait bordelais qui servit à celui de Versailles (1751) et à celui du château d’Anjony (Cantal) dans lequel sont simplement rajoutés des pendants d’oreilles et une broche de pierreries au décolleté.